Georges Tony Stoll

L’art n’est pas le lieu favori du secret

L’art n’est pas le lieu favori du secret, tout cela est bien trop simple à faire, il suffit d’apprendre à monter des coups et après ne pas arrêter d’en réaliser. Voilà ce que j’aime faire en effet, monter des coups et voir ce qui se passe après, dedans et dehors, en haut et en bas, autour, dans cet aura étrangère, peut-être une histoire simple de lumière parfaite, non, purement incongrue (voilà un mot bien laid mais que j’aime bien utiliser, comme « sublime» ou «extravagant », des mots qui vont bien à cette histoire de coup monté) enfin, pas d’inquiétude je vais mettre en mouvement ces silhouettes, je vais les réveiller et elles bougeront lentement dans un espace précis qui je l’espère fera rêver.

Il est clair et cela même sans que j’en sois si sûr, que les images produites à l’intérieur de cette série, aléatoire dans la durée, pourraient avoir été produites dans les conditions du roman (le caustique lunaire, Malcom Loewry), ces images pourraient avoir quelque chose à faire avec la description du lieu et de ses habitants, un hôpital psychiatrique, la description surtout de l’état du narrateur qui croit forcément être au bon endroit et qui forcément refuse cette reconnaissance, puisque c’est du symptôme et de son pouvoir dont il s’agit peut-être. Je ne peux dire que je m’assimile tout entier à cette histoire, je suis très attiré par l’idée d’un lieu que j’appelle le territoire de l’abstraction, sorte de lieu privé traversé par les effets du monde, une sorte de lieu où l’on peut aussi oublier, ou plutôt transformer la perception de ces effets par les effets du monde en un drôle de voyage par exemple, un voyage dans la stratosphère, là où le haut et le bas n’existent plus. Une drôle de lumière bleutée qui fait un certain bien, alors qu’il est pourtant impossible d’éviter un rappel à l’ordre. Voilà ce qui se passe dans tout mon travail, dans cette cartographie où les formes apparaissent d’une manière incessante, cette abstraction.

Dans le défilé des dessins on remarque combien dans leur construction, car il s’agit bien de construire le dessin, est présent un sentiment d’effarement, quelque chose qui est lié à la peur. Et cette peut devient une des forces d’un jeu sans qu’il soit possible de donner un nom à cette peur, la vivre simplement dans l’instant du regard.
Je suis sûr que la parole du regardeur a une place essentielle. Les dessins et les peintures pourraient être alors le genre d’images posées à ceux et à celles à qui on fait passer un test : que voyez-vous et pourquoi ? Il est alors clair de pouvoir travailler, de pouvoir faire ce travail lorsque la raison s’échappe. Il est donc possible aussi que l’échappement soit le lieu où le symptôme deviendrait une sorte de projet étrange qui aurait le but de nous satisfaire au moment où l’ennui et ses effets ne seraient plus sublimes. Une sorte de justification d’un désordre tout à coup ordonné. Voilà ce que j’ai envie d’appeler LE DESSIN INFINI, cette suite d’expériences qui se donnent à voir et qui attendent l’expérience de la parole.

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